La Phénoménologie - Traitement

L'histoire du concept de phénoménologie montre que, depuis Jean-Henri Lambert, la phénoménologie n’a cessé d’évoluer. C'est donc le contexte qui va déterminer si l'on parle de la phénoménologie au sens fichtéen, hégélien ou husserlien, même si en général, le terme de phénoménologie, pris isolément, désigne la philosophie et la méthode de Husserl ou de ses héritiers.

Comprise jusqu'à lui comme science de l’« apparaître », la phénoménologie devient, chez Heidegger, la science de ce qui n’apparaît justement pas à première vue ou, comme l'écrit Françoise Dastur citant Heidegger, une « phénoménologie de l'inapparent ».

Dans le phénomène de l'apparaître, la phénoménologie « post husserlienne », problématise la « constitution du sens » de ce qui se présente à la conscience, cela requiert une attitude qui ne se satisfait jamais de solutions définitives. Ainsi, Jean-François Courtine précise que « la phénoménologie ne caractérise pas le « Was  » (ce que c'est), mais le « Wie  » des objets, le comment de la recherche, la modalité de leur « être-donné », la manière dont ils viennent à la rencontre ». De telles recherches exigent de chacun qu'il refasse pour son compte l'expérience phénoménologique de celui qui l'a précédemment faite, note Alexander Schnell. La phénoménologie se constitue en opposition au « néokantisme » ; elle « consiste à décrire les phénomènes sans parti pris, en renonçant de façon méthodique à leur origine physiologico-psychologique ou à leur réduction à des principes préconçus », résume Hans-Georg Gadamer.

Le mot « phénomène » signifie étymologiquement « ce qui se montre », et il conserve, depuis son origine grecque un sens ambigu provenant de ce qu'il tient à la fois de l'objet et du sujet. Il est délicat de distinguer ce qui appartient à l'objet de ce qui appartient à l'interprétation propre au sujet (connaissance, illusion, erreur). Cette dépendance, vis-à-vis du sujet pourrait rendre difficile, voire impossible, la constitution d'une science, à partir d'une expérience, d'où le souci grec, notamment chez Platon et Aristote, de « sauver les phénomènes ».

- L'objet

La phénoménologie moderne est d'aller « droit à la chose même Nominon ».

La méthode

Si l'on suit Levinas, il n'y aurait pas de méthode proprement phénoménologique, mais seulement des gestes qui révèlent un air de famille de méthodes d'approche entre tous les phénoménologues. La « phénoménologie » n'a aucun contenu doctrinal à proposer, souligne de son côté François Doyon, il s'agit d'« une science qui n’en finit pas de naître et de renaître sous différentes formes », de quelque chose qui n'est même pas une méthode au sens scientifique, uniquement un « « cheminement » », un mode d'accès à la « chose »; c'est ce mode d'accès que Martin Heidegger va être amené à justifier dans un long paragraphe (7) de Être et Temps en prenant appui sur le sens grec initial de ce mot, une fois celui-ci décomposé en ses deux éléments originaires, à savoir, « phénomène » et « logos » ( 7 Être et Temps).

Le philosophe Gérard Wormser écrit que « la méthode distinctive (de la phénoménologie) est la « description eidétique », qui vise à rendre raison de l'essence d'un phénomène à partir de la série des variations dont est susceptible son appréhension ». Par la « réduction » le phénoménologue va chercher à isoler un noyau invariant qui permet « de rendre compte des phénomènes tels qu'ils se présentent dans leur nécessité d'essence ». Levinas recense ainsi, quelques caractéristiques de la geste phénoménologique :

  1. la place primordiale accordée à la sensibilité et à l'intuition. « La phénoménologie décrit les modes d'accès de la conscience à la signification, ainsi que le précise Husserl, en explorant les structures de l'intuition objectivante (noèse) et de son corrélat (noématique) en tant qu'il est inclus réellement dans l'intuition au sein de laquelle il se rapporte ».
  2. la disparition du concept, de l'objet théorique, de l'évidence, du phénomène idéalement parfait, au profit d'une attention portée à l'imperfection du vécu, de l'excédent et du surplus que le théorique laisse échapper, qui vont devenir constitutifs de la vérité du phénomène (ainsi du souvenir, toujours modifié par le présent où il revient, donc absence de souvenir absolu auquel se référer, la préférence accordée avec Kierkegaard, au dieu qui se cache, qui est le vrai dieu de la révélation). Ce qui semblait jusqu'ici un échec, une imperfection de la chose (la brumosité du souvenir), par un retournement radical du regard, devient un mode de son achèvement, sa vérité intrinsèque.
  3. la réduction phénoménologique qui autorise la suspension de l'approche naturelle et la lutte contre l'abstraction.

Dans ses Problèmes fondamentaux de la phénoménologie, Heidegger, complète cette approche en distinguant trois éléments constitutifs de la « méthode » phénoménologique : la réduction, la construction et la « destruction », ce dernier élément constituant à la fois le socle et l’apogée de sa méthode phénoménologique selon François Doyon.

- La réduction phénoménologique

La réduction phénoménologique ou épochè en grec consiste pour Husserl « à suspendre radicalement l'approche naturelle du monde », posé comme objet, réduction à laquelle s'ajoute une lutte sans concession contre toutes les abstractions que la perception naturelle de l'objet présuppose. La découverte de la « réduction phénoménologique » a donc le sens d'un dépassement du cartésianisme qui se limite à combattre le doute et requiert pour sa cohésion globale, la garantie divine, note Françoise Dastur.

Mais si pour Husserl l'« époché », ἐποχή, ou mise entre parenthèses du monde objectif, constituait l'essentiel de la réduction phénoménologique, il n'en allait pas de même pour Heidegger selon qui le « Monde» n'ayant, par construction, aucun caractère objectif, ce type de réduction s'avérait inutile.

De plus, pour Heidegger, la phénoménologie ne vaut en tant qu'instrument que pout autant que ses propres présupposés sont pris en compte dans la description elle-même. Par rapport à son maître Husserl, on note un certain nombre d'évolutions décisives telles que la recherche du domaine dit « originaire », sis dans l'expérience concrète de la vie, par un processus de « destruction » et d'explicitation, qui vont permettre à une herméneutique de la facticité de se développer.

Par contre, selon Alexander Schnell, on peut considérer qu'on a avec la définition heideggerienne de la phénoménologie, comme reconduction du regard de l'étant à la compréhension de son être, quelque chose qui est en soi un acte de « réduction phénoménologique ». Avec Heidegger, l'« enquête phénoménologique » ne doit pas tant porter sur les vécus de conscience, comme le croyait Husserl que sur l'être pour qui on peut parler de tels vécus, et qui est par là capable de phénoménalisation, à savoir le Dasein, c'est-à-dire, l'existant. Christoph Jamme écrit : « la phénoménologie doit être élaborée comme une auto-interprétation de la vie factive. Heidegger définit ici la phénoménologie comme science originaire de la vie en soi ».

En fait la « réduction phénoménologique » va jouer, dans Être et Temps, un rôle essentiel dans l’analytique du Dasein, notamment dans l'analyse de la quotidienneté et la mise à jour des structures existentiales du Dasein, en exigeant un regard résolument plus « authentique ». La réduction dans Être et Temps, conclut François Doyon, « apparaît comme un parcours de détachement progressif à l’aveuglement de la quotidienneté du monde ambiant afin de s’exposer résolument à la finitude radicale de son être ».

- La construction phénoménologique

C'est à l'opération d'induction de l'« être », qui n'apparaît jamais spontanément, à partir de l'étant que Heidegger a donné le nom de « construction phénoménologique », c'est une tâche, un projet, qu'il revient au Dasein de réaliser sachant « qu'il n'y a d'être que s'il y a compréhension de l'être, c'est-à-dire si le Dasein existe ». Pour Heidegger, « l’interprétation existentiale du Dasein, comme souci, dans Être et Temps, est une construction ontologique qui possède un sol et une pré-esquisse élémentaire ».

- La destruction phénoménologique

La « construction réductrice de l’être », en tant qu’interprétation conceptuelle de l’être et de ses structures, implique donc nécessairement une « destruction phénoménologique », c’est-à-dire une « dé-construction » ou démontage critique préalable des concepts légués par la tradition philosophique. Sophie-Jan Arrien note que Heidegger délaisse très rapidement la réduction phénoménologique husserlienne pour lui préférer une méthodologie de la « déconstruction» « qui loin d'être une mise entre parenthèse du caractère facticiel des phénomènes en jeu (le soi, l'histoire, la foi), consiste plutôt à partir d'une explicitation critique de ces concepts, en une traversée de la vie telle qu'elle se phénoménalise et se donne facticiellement ».

La « destruction phénoménologique » se donne pour tâche de démanteler les constructions théoriques, philosophiques ou théologiques qui recouvrent notre expérience de la vie facticielle et que nous devons faire apparaître. La tâche essentielle consistera à se rapprocher, par exemple, de l’Aristote originel, en se détournant de la scolastique médiévale qui le recouvre. De même, la destruction des présupposés de la science esthétique, qui va « permettre d'accéder à l'œuvre d'art pour la considérer en elle-même », est solidaire de la destruction de l'histoire de l'ontologie. C'est surtout dans son travail sur Aristote que Heidegger a pu préciser sa propre conception de la phénoménologie. Philippe Arjakovsky parle de « travail d'« anabase » que Heidegger a effectué pour dégager les soubassements tant ontologiques qu'existentiels de la Logique aristotélicienne[…] » ainsi est apparu en pleine lumière, le concept originaire de « phénomène » tel qu'il était compris par les grecs, c'est-à-dire, comme « ce qui se montre de soi-même ».

Mais comme pour Heidegger les « choses mêmes » ne se donne justement pas dans une intuition immédiate, il se sépare à cette occasion définitivement de Husserl, pour s'engager résolument dans le « cercle herméneutique ».

Autre exercice de déconstruction, le démantèlement de la tradition théologique avec laquelle il tentera, en s'inspirant de Luther et de Paul, de retrouver la vérité première du message évangélique, qu'il considère obscurcie et voilée dans la « Scolastique » inspirée d'Aristote.

- Le statut de la phénoménologie

Dans sa volonté de saisir le sens du monde en écartant tous les préjugés comme en renonçant à se situer dans un monde prédonné ou préformé, « la phénoménologie ne rejoint pas une rationalité déjà donnée, elle l'établit par une initiative qui n'a pas de garantie dans l'être et dont le droit repose entièrement sur le pouvoir effectif qu'elle nous donne d'assumer notre histoire la phénoménologie comme révélation du monde repose sur elle-même se fonde sur elle-même. car elle ne peut s'appuyer comme les autres connaissances sur un sol de présuppositions acquises. Il en résulte un redoublement infini d'elle-même. Elle se redoublera donc indéfiniment, elle sera comme le dit Husserl un dialogue ou une méditation infinie et dans la mesure où elle reste fidèle à son intention, elle ne saura jamais où elle va » écrit Bernhard Waldenfels dans sa contribution.

- Les grandes avancées husserliennes

* L'idée de phénoménologie chez Husserl

La phénoménologie de Edmund Husserl se définit d'abord comme une science transcendantale qui veut mettre au jour les structures universelles de l'objectivité. Le premier objectif poursuivi fut d'assurer un fondement indubitable aux sciences et pour cela d'éclairer les conditions théoriques de toute connaissance possible. Le projet de la phénoménologie fut d'abord de refonder la science en remontant au fondement de ce qu'elle considère comme acquis et en mettant au jour le processus de sédimentation des vérités qui peuvent être considérées comme éternelles.

La phénoménologie propose une appréhension nouvelle du monde, complètement dépouillée des conceptions naturalistes. D'où ce leitmotiv des phénoménologues qu'est le retour aux choses mêmes. Les phénoménologues illustrent ainsi leur désir d'appréhender les phénomènes dans leur plus simple expression et de remonter au fondement de la relation intentionnelle.

Husserl espère ainsi échapper à la crise des sciences qui caractérise le 20 e siècle. C'est avec la reprise détournée, du concept d'intentionnalité, empruntée à son maître Franz Brentano, que Husserl, consacre ses premiers pas en phénoménologie, : son principe en est simple, toute conscience doit être conçue comme « conscience de quelque chose ». En conséquence, la phénoménologie va prendre pour point de départ la description des vécus de conscience afin d'étudier la constitution essentielle des expériences ainsi que l'essence de ce vécu.

L'intuition fondamentale de Husserl, de ce point de vue, a consisté à dégager ce qu'il appelle l’« a priori universel de corrélation », qui désigne le fait que le phénomène tel qu'il se manifeste est constitué par le sujet, que dont chaque chose a, à chaque fois, pour chaque homme une apparence différente. Husserl ne verse pas pour autant dans le relativisme bien au contraire puisqu'il affirme que cette corrélation subjective est une nécessité d'essence. Ce qui veut dire que l'étant n'est pas autrement qu'il nous apparaît, il n'y a plus de chose en soi. En ce sens, on peut donc bien dire que la phénoménologie est une science des phénomènes, mais à condition d'y entendre qu'elle a une vocation descriptive des vécus (de l'expérience subjective). Pour autant, l'activité constitutive du sujet de la corrélation ne doit pas faire croire que la phénoménologie serait un pur subjectivisme. Comme le dit Merleau-Ponty, « le réel est un tissu solide, il n'attend pas nos jugements pour s'annexer les phénomènes », et en conséquence, « la perception n'est pas une science du monde, ce n'est même pas un acte, une prise de position délibérée, elle est le fond sur lequel tous les actes se détachent et elle est présupposée par eux ».

La phénoménologie husserlienne se veut également une science philosophique, c'est-à-dire universelle. De ce point de vue, elle est une science apriorique, ou éidétique, à savoir une science qui énonce des lois dont les objets sont des « essences immanentes ». Le caractère apriorique de la phénoménologie oppose la phénoménologie transcendantale de Husserl à la psychologie descriptive de son maître Franz Brentano, qui en fut néanmoins, à d'autres égards, un précurseur. La phénoménologie doit en ce sens se distinguer de l'ousiologie, laquelle, comme science philosophique, a pour but l'études des essences indépendamment de toute subjectivité exclusivement constituante.

Échappant à ces déterminations traditionnelles, on signale pour mémoire la dimension radicale de l'interprétation de cette pensée par son secrétaire particulier Eugen Fink dans son ouvrage De la phénoménologie.

- Le concept d'Intentionnalité

« La phénoménologie c'est l'Intentionnalité » affirme ni plus ni moins, Levinas. Heidegger donnerait son accord à cette parole, encore faut-il préciser les contours qu'il donne au concept d'« Intentionnalité », concept qu'il puise principalement dans les cinquième et sixième « Recherches logiques » de Edmund Husserl, que lui-même avait hérité de Brentano note Jean Greisch.

Traits généraux du concept d'intentionnalité

L'« Intentionnalité » qui est depuis Franz Brentano, un « se diriger sur », n'est plus une mise en rapport externe, mais une « structure interne à la conscience » souligne Jean Greisch. Avec Husserl cette conscience ne va plus être considérée comme un simple contenant, réceptacle des images et des choses, ce qu'elle était depuis Descartes; l'acte de conscience devient une intentionnalité visant un objet nécessairement transcendant précise Françoise Dastur.

Le même raisonnement est à appliquer aux actes de représentation quels qu'ils soient, chacun tire son sens de la spécificité de l'acte intentionnel. « Tout savoir d'objet est toujours simultanément un savoir que le « Moi » a de lui-même, et ceci n'est point simplement un fait psychique, c'est bien plus une structure d'essence de la conscience » comprend de son côté Eugen Fink.

Le fait que l'« Intentionnalité » soit un « a priori » appartenant à « la structure du vécu et non une relation construite après coup » entraîne un sens spécifiquement phénoménologique à la notion d'acte et notamment pour ce qui concerne l'acte de représentation qui peut emprunter selon Heidegger deux directions différentes, la voie naïve qui nous dit par exemple que ce fauteuil est confortable et lourd ou l'autre qui va s'inquiéter de son poids et de ses dimensions.

- Structure du concept

C'est à Husserl que l'on doit la découverte que la connaissance implique au moins deux moments intentionnels successifs (que Heidegger portera à trois), un premier acte correspondant à une visée de sens qui se trouve ultérieurement comblé par un acte intentionnel de remplissement. Heidegger saura s'en souvenir dans sa théorie du Vollzugsinn ou sens de « l'effectuation » qui domine sa compréhension de la vie facticielle et qui fait suite à deux autres moments intentionnels, le Gehaltsinn (teneur de sens), et le Bezugsinn (sens référentiel). C'est la structure intentionnelle de la vie facticielle qui nous livre ce ternaire. Pour une analyse approfondie de ces concepts voir Jean Greisch.

- L'intuition catégoriale

Dans la 6e de ses « Recherches logiques », Husserl, grâce au concept d'« intuition catégoriale », « parvient à penser le catégorial comme donné, s'opposant ainsi à Kant et aux néo-kantiens qui considéraient les catégories comme des fonctions de l'entendement ».

Il faut comprendre cette expression d'« intuition catégoriale » comme « la simple saisie de ce qui est là en chair et en os tel que cela se montre » nous dit Jean Greisch. Appliquée jusqu'au bout cette définition autorise le dépassement de la simple intuition sensible soit par les actes de synthèse, soit par des actes d'idéation.

Un exemple de l'extraordinaire fécondité de cette découverte nous est donnée dans les avancées qu'elle a permises pour délivrer Heidegger du carcan du sens attributif de la copule. Dans la proposition « le tableau est mal placé », « l'entrelaçement du nom et du verbe fait que la proposition ajoute aux termes isolés, une composition qui relie et sépare donnant à voir un rapport irréductible à une relation formelle, rapport sur lequel elle se fonde plutôt qu'elle ne la fonde ».

- Élargissement heideggérien

Délaissant l'ontologie spéculative et la phénoménologie descriptive Heidegger considère dans Être et Temps « que l'ontologie et la phénoménologie devaient bel et bien partir de l'herméneutique du Dasein ». S'il a été beaucoup dit que la phénoménologie de Heidegger était une herméneutique Jean Grondin souligne que l'herméneutique est elle-même une phénoménologie au sens où « il s'agit de reconquérir le phénomène du Dasein contre sa propre dissimulation ». Après Être et temps, Heidegger ne s'intéressera plus à la description du sens de l'Être à partir du Dasein « mais il tente de le faire voir tel qu'il se déploie dans et par la pensée » écrit Sylvaine Gourdin, qui fait par ailleurs en note la remarque suivante : « Sans doute faudrait-il préciser et dire qu'il s'agit (avec Heidegger) d'une phénoméno-logie, c'est-à-dire non d'une science descriptive et épistémologique des phénomènes tels qu'ils apparaissent à la conscience mais d'une pensée ou d'un dire du seul « phénomène », qui en réalité intéresse Heidegger, à savoir l'Être ».

- La phénoménologie sectorielle contemporaine

  • Sergiu Celibidache : phénoménologie de la musique
  • Gaston Bachelard : phénoménologie de l'imagination
  • Maurice Merleau-Ponty : phénoménologie de la perception
  • Jan Patočka : phénoménologie dynamique ou phénoménologie du monde naturel
  • Hans-Georg Gadamer : phénoménologie du dialogue
  • Michel Henry : phénoménologie de la vie (comme auto-affection)
  • Paul Ricœur : phénoménologie de la volonté
  • Jean-Luc Marion : phénoménologie de la donation
  • Renaud Barbaras : phénoménologie de la vie (comme mouvement)
  • Claude Romano : phénoménologie de l'événement
  • Bruce Bégout : phénoménologie de la quotidienneté
  • Alexander Schnell : phénoménologie constructive
  • Jean-Louis Chrétien : phénoménologie de la parole
  • Erazim Kohák : écophénoménologie
  • Marc Richir : refonte de la phénoménologie
  • Henri Maldiney : phénoménologie de l'existence

- Le tournant théologique de la phénoménologie française

Dominique Janicaud, rappelle que dans la vision De Husserl, l'intentionnalité ne concerne que les phénomènes du monde et en aucun cas l'au-delà du monde. Renaud Barbaras rappelle l'impératif explicite de Husserl : « toute intuition donatrice originaire est une source de droit pour la connaissance mais tout ce qui s'offre à nous dans cette intuition doit être simplement reçu pour ce qu'il se donne, sans outrepasser les limites dans lesquelles il se donne ».

À l'occasion d'un véritable pamphlet, publié en 1990, intitulé Le tournant théologique de la phénoménologie françaiseDominique Janicaud dénonce le fait qu'à « partir des années 1970, s'opère une singulière ouverture au transcendant, à l'absolu et à l'originaire qui [..] scellent une alliance avec des préoccupations de type théologique ou religieux ». Il situe en 1961 avec la publication de Totalité et Infini d'Emmanuel Levinas la première œuvre majeure de philosophie qui assume ce tournant de la phénoménologie vers la théologie, tendance confirmée depuis lors par toute une série d'autres philosophes (Paul RicœurMichel HenryJean-Luc MarionJean-Louis Chrétien). Pour Dominique Janicaud, face à ces multiples démarches, qui réintroduisent « l'absolument Autre » (Levinas), « l'Archi-Révélation de la vie »(Michel Henry), la donation pure (), la question devient : qu'est-ce qui reste de phénoménologique dans ces œuvres ? Toutes ces tentatives restent éloignées de la neutralité scientifique dont Edmund Husserl désirait doter la phénoménologie.

- Applications pratiques

La phénoménologie connaît aussi des applications pratiques.

  • Natalie Depraz - recherches sur l'adaptation de l'attitude phénoménologique lors de pratiques d'entretiens
  • Emmanuel Galacteros - fondateur de l'entretien phénoménologique de la vie radicale (inspiration Michel Henry)
  • Alfonso Caycedo - pratiques de la réduction phénoménologique (Edmund HusserlMartin HeideggerLudwig Binswanger) psychiatrie et prophylaxie sociale.
  • Phénoménologie appliquée axiologos.
  • Pierre Vermersch, technique de l'entretien d'explicitation et la psycho-phénoménologie
  • Henri Maldiney - étude des pathologies psychiques comme fléchissement des modalités d'existence.
  • Le Cercle herméneutique : cette revue de phénoménologie anthropologique aborde des sujets appliqués au quotidien, avec des sujets autour de l'hystérie, la paranoïa, le sentiment d'étrangeté à soi, le besoin d'événements, l'homme intérieur et le discours intérieur.
  • Recherches qualitatives au Canada

La phénoménologie a aussi eu une grande influence sur la psychologie telle qu'elle se pratique encore de nos jours et plus généralement sur l'épistémologie. Elle a donné naissance à une clinique psychiatrique particulièrement riche, à partir des travaux du psychanalyste Ludwig Binswanger. En France, elle influença le courant de la psychothérapie institutionnelle

Dr. Karam Ouharou - La phénoménologie - Traitement - 

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